Région de Kherson : avec l’électricité, les gens reviennent

Région de Kherson : avec l’électricité, les gens reviennent

Ukrinform
Les travailleurs du secteur énergétique de Bucovine rétablissent l’électricité dans les villages et villes désoccupés du sud de l’Ukraine depuis près d’un an.

À l’automne 2022, alors que l’armée ukrainienne libérait des localités sur la rive droite de la région de Kherson, des équipes d’énergéticiens de la région de Tchernivtsi y sont allées pour reconstruire les lignes électriques endommagées. Vysokopillia, Arkhangelske, Pravdyne, Posad-Pokrovske, Tavriiske  l’électricité a été progressivement rétablie dans les grands et petits villages et villes et, par conséquent, d’autres réseaux publics ont également été rétablis. Avec l’apparition de l’électricité dans les maisons, la vie revenait dans les localités.

Ivan RYBAK et Serhii GRYNKO, chefs des équipes de la SA « Tchernivtsioblenergo », ont parlé au correspondant d’Ukrinform des difficultés de travail des énergéticiens sur le territoire désoccupé, des dangers du travail à proximité de la ligne de front, de la barbarie des Russes et de la gentillesse des habitants locaux.

LES RÉSEAUX EXISTANTS NE PEUVENT PAS ÊTRE RÉPARÉS

Au total, 64 employés et chefs ont participé à la mission de restauration des réseaux électriques dans la région de Kherson. Douze équipes de la SA « Tchernivtsioblenergo » travaillaient, en se remplaçant toutes les deux semaines. Ils sont arrivés avec leur propre équipement, leurs spécialistes et certains matériaux. Les collectivités locales ont aidé avec le logement et l’organisation des conditions de vie. Comme l’admettent eux-mêmes les énergéticiens, ils y vivaient dans des conditions « semi-spartiates ». Et l’amélioration de ces conditions dépendait précisément de la rapidité et de la qualité des travaux de restauration.

Serhii GRYNKO (dernier à gauche) avec l’équipe

Les premières équipes de spécialistes de Bucovine sous la direction de Serhii GRYNKO sont venues sur le territoire de la communauté de Vysokopillia le 1er octobre 2022. À cette époque, la libération effective du territoire occupé de la rive droite de la région de Kherson venait juste de commencer.

- Nous avons dû y restaurer des sous-stations 10/0.4 kV dans les localités pour acheminer l’électricité directement d’elles vers les abonnés. Et il y avait aussi la tâche de restaurer les lignes à haute tension de 10 kV afin de remettre en état ces sous-stations, - explique GRYNKO.

L’homme admet que c’était effrayant d’aller pour la première fois sur le territoire désoccupé de la région de Kherson.

- La ligne de front était alors très proche. Nous avons entendu des arrivées et des départs. Au fil du temps, nous avons appris à les distinguer. Au début, nous ne comprenions pas du tout si le bruit de l’explosion venait de loin ou de près. À cette époque, en notre présence, l’ennemi a bombardé un grenier et une école locale à Vysokopollia. Nous avons alors dû traverser des moments pas très agréables, - se souvient l’énergéticien.

La tâche principale des énergéticiens de Bucovine était de restaurer les lignes électriques endommagées. Mais, selon les spécialistes, il n’y avait presque rien à réparer. Il a fallu refaire les réseaux.

- Des sous-stations de transformation ont été endommagées par des débris d’obus, des poteaux ont été cassés, des fils ont été déchirés. En fait, nous avons tout construit à partir de zéro. Lorsque nous arrivons dans une localité, nous commençons d’abord à nettoyer le territoire. Nous enlevons tout ce qui a été détruit, puis installons de nouveaux piliers, de nouvelles sous-stations, acheminons l’électricité vers ces sous-stations et ensuite vers les consommateurs », - continue Serhii GRYNKO.

L’homme raconte que dans certaines localités, les maisons n’ont pas seulement été détruites par des débris d’obus : il y avait des rues entières avec des maisons incendiées.

- On voyait la différence entre le centre du village et sa périphérie. Plus près des champs où étaient basés les occupants, les maisons ont été tout simplement incendiées. Il est probable que les Russes les ont délibérément brûlés pour que personne ne puisse surveiller leurs positions, - affirme l’énergéticien.

Une autre caractéristique des villages et des villes de la région de Kherson qui venaient d’être libérés de l’occupation était que les toits de presque toutes les maisons étaient détruites. Après le retour des autorités ukrainiennes au village, les habitants ont d’abord reçu une bâche bleue pour couvrir les toits.

- Quand on regarde le village depuis un drone quelque part dans notre pays, les toits des maisons sont de différentes couleurs  marron, gris ou rouge. Et lorsque nous avons lancé le drone dans la région de Kherson pour inspecter le territoire du village, tous les toits étaient bleus. Ils sont recouverts de cette bâche, - dit un autre énergéticien Ivan RYBAK.

DANS LE VILLAGE DE VYSOKOPILLIA LES RUSSES VIVAIENT... À LA PORCHERIE

Les habitants locaux, qui ont vécu pendant 9 mois sous occupation, se sont montrés généralement amicaux envers les travailleurs du secteur énergétique de Bucovine. Ils nous offraient du café préparé sur le feu et invitaient souvent toute l’équipe à déjeuner ou à dîner.

Ivan RYBAK

- Bien sûr, les choses se passaient différemment lors de ces voyages d’affaires. Mais l’attitude positive de la population locale prédominait. Je me suis souvenu de notre travail dans le petit village de Tavriiske. Un jour, les propriétaires de la maison près de laquelle nous travaillions sont venus nous voir et ont invité tout le monde à déjeuner. Il n’y avait ni électricité, ni gaz, mais ils ont cuisiné du bortsch sur le feu et ils nous ont nourris. Le jour suivant, leurs voisins nous ont invités et nous ont également nourris. C’était agréable d’avoir une attitude si amicale de la part des gens, - continue l’histoire Ivan RYBAK.

Il a rappelé le cas où le propriétaire de la ferme est retourné dans l’un des villages libérés de la région de Kherson. Pendant l’occupation, des militaires russes y étaient basés.

- C’était à Vysokopillia. Le propriétaire de la ferme est venu afin de voir ce qui survivait, de restaurer quelque chose et de comprendre comment avancer. Ils y avaient un bureau où travaillait le service de gestion et de comptabilité avant la guerre. Lorsque le village a été occupé, les propriétaires ont tout abandonné et ont été contraints de fuir. Et des « orcs » se sont installés à la ferme. Ce propriétaire m’a donc demandé de montrer les conditions dans lesquelles vivaient les occupants. Imaginez, ils ont retiré tous les meubles des locaux du bureau et les ont déplacés... dans la porcherie ! Ils y vivaient : ils mangeaient, dormaient, allaient aux toilettes, en compagnie des cochons qui y séjournaient. Ils les abattaient, les dépeçaient et les cuisinaient là-bas. Je ne comprends pas : ont-ils déménagé dans la porcherie parce qu’ils avaient peur que les obus pourraient toucher le bureau ou sont-ils comme ça dans la vie et sont-ils plus à l’aise à côté des cochons ? Je ne peux pas imaginer comment il est possible de vivre ainsi, - se demande l’énergéticien de Tchernivtsi.

Il a également rappelé comment, dans le même village, il a vu un minibus plein de téléviseurs criblés de balles. Les militaires russes ont saccagé ce village et ils ont pris les « trophées », principalement les téléviseurs, de toutes les maisons voisines. Et quand ils s’enfuyaient, ils n’ont pas pu emporter tout cela. Par conséquent, ils ont décidé de tirer sur tout l’équipement ainsi que sur le minibus avec une mitrailleuse afin que personne ne puisse plus l’utiliser.

Les premières équipes d’énergéticiens de Bucovine travaillaient sous un feu constant. Ils devaient souvent se cacher dans des abris anti-bombes, fuir les drones ennemis. Après tout, le processus de libération de la rive gauche de la région de Kherson n’était pas encore achevé à cette époque. La ligne de front se trouvait à 15-20 kilomètres des territoires qui venaient d’être libérés.

Un peu plus tard, en novembre 2022, les troupes russes ont commencé à se retirer massivement vers la rive gauche de la région de Kherson. Et il est devenu plus facile pour les spécialistes de rétablir l’électricité. Au moins, les bruits des explosions se sont atténués et n’ont pas été ressentis si près. Le principal danger était les mines explosives, très nombreuses dans les villages désoccupés. Les experts en énergie rappellent notamment qu’il était très dangereux de travailler dans les localités où étaient basés les Wagnérites.

- Ils se battaient avec l’armée ukrainienne. Ils se battaient avec des civils. Après tout, comment expliquer les pièges et autres dispositifs explosifs placés dans les endroits où les enfants courent et les simples habitants marchent : sur les piliers, sur les panneaux routiers, sur les terrains de jeux, à proximité des écoles, des jardins d’enfants ? C’est terrible ! - Serhii GRYNKO partage ses impressions.

UN ÉNERGÉTICIEN DE BOUCOVINE A SAUTÉ SUR UNE MINE

Selon lui, les premiers à entrer dans les localités libérées étaient les soldats et les sapeurs qui déminaient le territoire. Cependant, aucun service ne garantira à cent pour cent que tel ou tel territoire est devenue sûre. Après tout, il est impossible de tout prévoir. Cela devenait particulièrement dangereux au printemps, lorsque l’herbe poussait, les pièges posés par l’ennemi et les obus éparpillés non explosés étaient plus difficiles à remarquer et à neutraliser.

- Bien sûr, après les sapeurs, c’était plus facile pour nous de travailler. Mais, il était entendu qu’il fallait garder l’œil ouvert, car à tout moment on peut marcher sur une sorte d’explosif, - ajoute Ivan RYBAK.

Durant cette période, les énergéticiens de Bucovine travaillaient presque constamment sur le territoire désoccupé de la région de Kherson. Ces voyages ne se sont arrêtés que pour un temps, lorsqu’un des énergéticiens de Bucovine a sauté sur une mine antipersonnel. L’homme a perdu une partie de sa jambe.

- Pendant plusieurs semaines, nous avons simplement essayé de « nous éloigner » du stress vécu. Сe incident s’est produit pendant le travail de notre équipe dans le village d’Arkhangelsk. Il restait la dernière ligne de 0.4 kV pour rétablir complètement l’électricité dans ce village. Plus d’un mois s’est déjà écoulé depuis la désoccupation. Le village a été débarrassé de ses ennemis et les gens ont commencé à y retourner. La rue a été débarrassée des restes des bombardements et les enfants y courraient. Et là, un de nos collègues a marché sur une mine antipersonnel en plastique. J’ai traversé cet endroit avec d’autres travailleurs, nous n’avons rien remarqué, puis il a marché dessus. En fait, l’homme s’est retrouvé sans jambe presque jusqu’au genou. Dès le début et après notre retour à Tchernivtsi, nous avons constamment aidé notre collègue blessé avec le traitement, nous l’avons soutenu moralement. Puis nos voyages d’affaires dans la région de Kherson ont repris, - a conclu Serhii GRYNKO.

Les collègues des énergéticiens de Bucovine, les travailleurs du secteur énergétiques de la région de Kherson, ont également été touchés par des actions militaires de l’armée ennemie. Un jour, près de la localité où travaillaient les spécialistes de la région de Tchernivtsi, la voiture de la SA « Khersonoblenergo » a explosé sur une mine antichar. Trois personnes sont alors mortes. Deux autres énergéticiens de la région de Kherson ont été tués par les Russes lors du bombardement de Tchornobaivka. Certains sapeurs qui travaillaient avec les énergéticiens sont aussi morts.

Les spécialiste de Bucovine admettent que travailler sur le territoire désoccupé était certes dangereux, mais honorable. Selon eux, lorsqu’on rétablit l’approvisionnement en énergie après une sorte d’intempéries, - c’est le genre de travail qui profite aux gens, mais auquel on s’habitue avec le temps. Et lorsqu’on fournit de l’électricité dans un village presque désert et sous occupation, les habitants duquel n’avait pas de l’électricité pendant longtemps, et après ça il semble reprendre vie, - c’est deux fois plus agréable.

- Notre service commence. Nous venons dans un village, où vivaient principalement des personnes âgées et où il y avait beaucoup de chiens et de chats. Mais, au fil du temps, nous posons des lignes, peu à peu l’électricité apparue dans les maisons, d’autres réseaux sont installés. Et déjà à la fin de notre service, on peut voir dans ce village des enfants qui courent dans la rue, des jeunes qui marchent. C’était agréable de sentir la vie revenir ici. Et c’est agréable de réaliser que nous y avons également contribué avec notre travail, - partage ses impressions l’énergéticien Ivan RYBAK.

Référence : D’octobre 2022 à fin juin 2023, les énergéticiens de Bucovine ont restauré les réseaux électriques dans de nombreuses localités de la région de Kherson, dans les districtes desservies par les Services de réparation et d’entretien des réseaux électriques de Bilozerka et de Beryslav.

Selon des estimations approximatives, plus de 21 km de lignes à haute tension PL-10 kV et environ 90 km de lignes PL-0.4 kV ont été construits dans le territoire de Tavriisk. Plus de 700 piliers électriques ont été remplacés. Environ 240 km de câbles ont été remplacés. Environ 800 branches dans les maisons des habitants locaux ont été remplacées. Au total, le système d’alimentation électrique normal a été rétabli pour plus de 1 500 ménages de la région de Kherson.

Vitalii Oliinyk, Tchernivtsi

Photos ont été fournies par le service de presse de la SA « Chernivtsioblenergo »


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