RSF dénonce un anéantissement total de l’information indépendante dans les territoires ukrainiens occupés temporairement par la Russie
Reporters sans frontières (RSF) dénonce un anéantissement total de l’information indépendante dans des régions de l’est de l’Ukraine, occupées par la Russie depuis mai 2014. Les journalistes qui refusent de collaborer avec la Russie sont menacés et arrêtés, beaucoup ont choisi de quitter les territoires occupés.
« C’est un sinistre anniversaire : depuis dix ans, les populations de Donetsk et Louhansk n’ont plus accès à une information libre, plurielle et fiable. Les autorités d’occupation ont méthodiquement cadenassé les médias et journalistes indépendants pour les remplacer par les relais du Kremlin, avec une mainmise sur les médias locaux d’abord, puis en ouvrant leurs propres relais de propagande après l’invasion russe de l’Ukraine à grande échelle en février 2022. RSF s’indigne de la disparition du journalisme indépendant, qui a projeté les habitants de ces territoires dans les limbes de la désinformation », a déploré Jeanne Cavelier, Responsable du bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF
Selon un nouveau rapport de RSF, la Russie contrôle l’environnement d'information en imposant des médias de propagande. Le dernier en date est « Novoe.Media » (“Le nouveau média”), lancé le 11 avril dernier. Il diffuse chaque jour le narratif du Kremlin auprès des populations de l’est et du sud-est de l’Ukraine.
Dès 2019, la « république populaire de Louhansk » comptait plus de 200 médias sous contrôle russe sur son territoire et la « république populaire de Donetsk », une trentaine. Les « autorités locales » ont aussi fait main basse sur des médias ukrainiens pré-existants, à l’image de la chaîne de télévision Union TV transformée depuis 2014 en relais de la propagande russe.
L’occupation de l’espace informationnel s’est intensifiée depuis l’invasion russe du 24 février 2022. Des médias de la Fédération de Russie se sont aussi officiellement installés à Donetsk et Louhansk, comme le groupe de radio-télévision d’État VGTRK qui a ouvert une filiale à Donetsk en septembre 2023. Certaines de ces chaînes sont accessibles sur les territoires contrôlés par le gouvernement ukrainien, entre 20 et 50 kilomètres au-delà de la ligne de front.
Des reporters locaux refusant de collaborer avec les médias pro-Kremlin ont été arrêtés. C’est le cas de Stanislav Asseïev, correspondant ukrainien pour le média américain Radio Free Europe/Radio Liberty (RFE/RL), enlevé en 2017 à Donetsk pour « espionnage ». Torturé et détenu pendant près de deux ans, il a été libéré lors d’un échange de prisonniers en 2019. En janvier 2024, son tortionnaire a finalement été condamné à 15 ans de prison par la justice ukrainienne.