Nous vous proposons les principales thèses de cet entretien.
Les autorités sont en contact avec les défenseurs de Marioupol
Les autorités ukrainiennes à différents niveaux sont en contact avec les troupes bloquées à Marioupol. Les défenseurs de la ville combattent aujourd'hui l'ennemi, dont les forces sont six fois supérieures aux forces ukrainiennes à Marioupol.
« Nous sommes en contact avec nos gars qui sont dans l'usine bloquée, nous sommes en contact avec eux, nous parlons à différents niveaux chaque jour, nous les soutenons autant que nous le pouvons. Mais ils savent qu'ils accomplissent aujourd'hui l'une des missions les plus puissantes et les plus importantes, et c'est vrai, car, en effet, leur ennemi a tellement peur que ses forces à Marioupol sont six fois supérieures aux forces ukrainiennes » a déclaré Zelensky, ajoutant que le quantité d'équipement de l'ennemi est dix fois supérieurs au quantité des troupes ukrainiennes.
Le président a ajouté que les militaires ukrainiens contrôlent une partie de Marioupol qui « n’est pas très grande ».
Aussi, selon lui, la ville est en crise humanitaire, il y a un manque de nourriture, d'eau, pas de médicaments.
« Néanmoins, les gars se défendent héroïquement, nous leur en sommes reconnaissants. Un merci c’est certainement trop peu, c'est pourquoi certains plans et processus de négociation sont en cours d'élaboration. Pour être honnête, je n’ai aucune confiance dans les négociateurs russes en ce qui concerne Marioupol », a souligné le chef de l'État ukrainien.
Le président ukrainien a dit qu'il y avait un accord sur un corridor humanitaire négocié par la Turquie, mais à un moment donné, la Russie avait refusé.
« Pour être honnête, je n’ai aucune confiance dans les négociateurs russes en ce qui concerne Marioupol. Nous avons convenu que nous aurions un corridor humanitaire, médiatisé par la Turquie et personnellement par le président Erdogan. Nous avons convenu que la Turquie pourrait récupérer nos blessés, nos morts qui se trouvent à Marioupol via Berdyansk, et les civils aussi, avant tout, les femmes et les enfants, il y a de très jeunes enfants là-bas. Et nous avons convenu que ce serait le cas. Et puis, à un moment donné, la Russie a refusé. C'est pourquoi je dis qu'je ne leur fais plus beaucoup de confiance», a déclaré Zelensky.
Zelensky a également souligné qu'il n'y avait pas de statistiques précises sur la situation à Marioupol, mais a ajouté que « de nombreuses personnes ont disparu ».
À Marioupol, la Russie veut répéter le scénario du « siège d'Ilovaïsk »
Le président ukrainien n'exclut pas que la Russie, lorsqu'elle propose aux défenseurs de Marioupol de se rendre et promet de les épargner, veuille en réalité fusiller des soldats ukrainiens, comme elle l’a fait à Ilovaïsk en 2014.
« Personnellement, je pense qu'ils font vraiment une différence entre nos militaires qui sont là-bas. Et vous le savez. Il y a mos militaires là-bas qu'ils détestent. Je ne crois pas qu'ils les épargneront, même s’ils l’avaient promis. Peut-être, ce sera comme à Ilovaïsk. Je le pense, mais il faut demander l’opinion de nos militaires », a ajouté Zelensky.
Il a noté que les Russes exerçaient une pression psychologique sur les militaires ukrainiens en leur promettant de les épargner.
« Je sais qu'ils ont proposé à nos gens de se rendre, d'aller en captivité. Nous le savons par de nombreuses sources. Donc, ils diffusent constamment cette information à travers leur peuple, exercent une pression psychologique sur eux pour qu'ils se rendent et partent en captivité. Ensuite, ils proposer de leur épargner la vie », a-t-il ajouté.
Selon le président, on peut aider Marioupol, tout d'abord, en dotant l'Ukraine d'armes puissantes, dont le gouvernement parle constamment aux partenaires internationaux. Une autre option consiste à négocier avec la partie russe si elle est d'accord. Après tout, un cessez-le-feu est nécessaire maintenant, au moins sur le territoire de Marioupol, afin de prendre certaines mesures humanitaires, au moins pour aller chercher les blessés et les morts.
« Une autre option est d'en parler au niveau des dirigeants internationaux. J’ai fait savoir à tout le monde que j’accepterais n’importe quel format de négociations pour sauver nos gens, sur n'importe quel format d'échange, si en principe l’autre parti est prêt », a souligné Zelensky.
Dans le même temps, Volodymyr Zelensky a précisé que les défenseurs de Marioupol étaient déjà devenus des héros, alors maintenant s'ils prennent une décision, personne ne leur interdira de faire ce qu’ils ont décidé.
L'élimination des soldats ukrainiens à Marioupol mettra fin à toute négociation.
Selon le président ukrainien, l'élimination des soldats ukrainiens à Marioupol mettra fin à toute négociation avec les Russes.
« L'élimination des soldats ukrainiens à Marioupol et c’est ça que les Russes sont en train de faire, mettra fin à toute négociation. Je pense que c'est leur grosse erreur (russe - éd.) s'ils disent vraiment qu'ils veulent y mettre fin », a déclaré Zelensky.
Il a assuré que le gouvernement ukrainien ne marchanderait pas de territoires et de personnes, mais comprenait que des négociations étaient nécessaires pour protéger l'État et mettre fin à la guerre.
Le président a souligné que plus l'Ukraine serait forte, meilleur serait le résultat des pourparlers. Dans le même temps, il a souligné que « plus il y aura des villes comme Borodyanka, moins il y aura de chances pour des négociations ».
« Nous avons Bucha, Borodyanka, etc., et encore nous ne sommes pas allés à Marioupol, la situation y pourrait être dix fois plus catastrophique qu’à Borodyanka », a ajouté la chef de l’État.
Sur le changement d'attitude des pays occidentaux à l'égard des livraisons d'armes à l'Ukraine
Volodymyr Zelensky a noté à propos de la fourniture d'armes à l'Ukraine qu ' « au début, personne ne l'a fait rapidement, puis, lorsque les citoyens de ces pays eux-mêmes ont commencé à faire pression sur leurs gouvernements, alors les responsables politiques de ces pays ont commencé à changer d'attitude et à nous donner des armes ou accélérer ces processus ». Selon le président, à partir du moment où ils disent avoir décidé de fournir des armes à l'Ukraine, « à partir de ce moment jusqu'au moment où ces armes sont déjà dans notre armée, cela peut prendre 2-3 semaines, c'est-à-dire - c'est un processus très long ». Parce que nos gars disent : « On a besoin d'aide maintenant et c'est une question de jours, deux ou trois jours, et les gens disent : « Tout va bien, on vous donnera en mai (les armes - ndlr). Sur quoi comptent-ils ? Qu'il faut se battre pendant des mois, des années (sera - NDLR) ? Certains d'entre eux y comptent probablement ».
Selon le président ukrainien, « pour nous, l'accélération des armements est un moment très important. Et la rhétorique de certains pays a changé c'est sûr, elle est devenue plus favorable, si vous pouvez utiliser un tel mot pour les livraisons d'armes ».
Volodymyr Zelensky a noté qu'en principe, l'approvisionnement « est débloqué, nous obtenons maintenant des armes. Nous l'obtenons, je pense, peu, la Russie pense que nous en obtenons beaucoup. C'est aussi un bon résultat, je pense ».
« Je pense que les États-Unis, la Grande-Bretagne, la Pologne et plusieurs autres pays nous soutiennent très bien aujourd'hui, mais ils peuvent certainement en faire beaucoup plus », a déclaré le président.
Quatre pays sont prêts à devenir les garants de la sécurité de l'Ukraine
Le Royaume-Uni, les États-Unis, l'Italie et la Turquie sont prêts à devenir les garants de l'Ukraine, mais le nombre de pays peut augmenter et il n'y a de réponse définitive d'aucun pays.
Le document sur la fin de la guerre peut consister en deux traités distincts
Le document final sur la fin de la guerre de la Russie contre l'Ukraine peut consister en deux parties - un accord sur les garanties de sécurité pour l'Ukraine et un accord bilatéral séparé entre l'Ukraine et la Russie.
« Je pense qu'il peut s'agir de deux documents différents. Un qui contiendra des garanties de sécurité des pays qui sont prêts à fournir ces garanties de sécurité et un document séparé avec la Russie », a déclaré le chef de l'État ukrainien en réponse à une question sur le document final à la fin de la guerre.
Le président a noté que la Russie aimerait avoir un accord qui couvrirait toutes les questions. Cependant, selon lui, tous les pays qui pourraient être garants de la sécurité ne se voient pas à la même table avec la Fédération de Russie.
« Pour eux, les garanties de sécurité pour l'Ukraine sont un problème, et les accords avec la Russie en sont un autre. La Russie veut que tout soit dans un seul document, et les gens disent : « Désolé, nous avons vu ce qui s'est passé à Boutcha»,. « Les circonstances changent, les formats des futurs accords changent, la possibilité même de signer un accord diminue quand on constate que les troupes russes ont commis des crimes en Ukraine. Tout le monde voit cela, et ils veulent de moins en moins avoir des accords avec la Russie, et en même temps ils veulent avoir des accords avec l'Ukraine », a déclaré Zelensky.
La Russie veut occuper le plus de territoire possible pour faire pression lors des négociations
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky estime qu'une seule réunion avec les dirigeants russes ne suffira pas pour tout régler et s'entendre sur toutes les questions qui conduiront à la paix.
« Je suis pour le fait que la rencontre avec la Russie ait eu lieu le plus tôt possible. Je ne pense pas que cela coûtera une réunion. Je ne pense pas qu'on puisse se rencontrer une fois et tout régler. Parce qu'il y a beaucoup de questions. Je ne sais pas encore s’ils accepteront notre proposition ou si nous accepterons la leur », a-t-il déclaré.
En particulier, selon lui, cela concerne la question des territoires occupés par la Russie des régions de Donetsk et Louhansk.
« Ils veulent changer constamment le statut dans cette partie, et nous voulons une sorte d'accord pour que ces gens qui se considèrent comme des Ukrainiens, pour qu'ils sachent où ils vivent, pas sur une île au milieu de la terre, mais dans une région d’un État. Je crois que ce territoire fait partie de l'Ukraine, ils croient qu'ils font partie de l'Ukraine, les militants des soi-disant Républiques populaires de Donetsk et de Louhansk croient qu'ils font partie de la Russie, et la Russie ne les considère pas comme faisant partie de la Russie, mais comme des « républiques » à part. Ils ont peur d'être des républiques à part, car s'ils sont des républiques à part, ils comprennent qu'à un moment donné, l'Ukraine pourrait venir les récupérer. Peut-être. Et la Russie craint que l'Ukraine ne vienne, et veut un statut neutre pour que l'Ukraine n'y vienne jamais. C'est-à-dire beaucoup de questions. Et la question la plus importante pour moi est : « Qu'est-ce que nous voulons tous avoir sur ces territoires ? », a-t-il déclaré.
Dans le même temps, Volodymyr Zelensky a ajouté qu'il serait peu probable que la réunion se tienne tant que l'on ne sait pas exactement quels pays sont prêts à devenir des garants de la sécurité et dans quelles conditions, car le cours des négociations en dépendra également. Il a également ajouté que des pourparlers diplomatiques devraient avoir lieu lorsque la Russie mettra fin à la guerre.
« Vous pouvez penser à la diplomatie, mais ils veulent résoudre les problèmes diplomatiquement quand il y a une guerre. C'est très difficile, et c'est pourquoi ils veulent prendre une partie de notre territoire pour pouvoir nous mettre la pression. Et pourquoi se rencontre-t-on ? Je ne sais pas pourquoi se rencontrer s'ils veulent s'emparer de tout notre État », a déclaré Zelensky. En général, a-t-il ajouté, l'Ukraine est prête à tenir un dialogue sur de nombreuses questions controversées et à rechercher des voies communes.
Sur les conditions poser par la Russie pour rencontrer Poutine
La Fédération de Russie a insisté sur le fait que les rencontres entre les présidents de l'Ukraine et de la Russie n'étaient possibles qu'après des accords définitifs sur tous les points des pourparlers.
« Depuis le début de la guerre, nous avons proposé une réunion de deux présidents. Ils ne veulent cette rencontre qu'après des accords définitifs sur tous les points des pourparlers. Honnêtement, avec tout le respect que je dois à tous les négociateurs, à tous les processus de négociation, je ne veux pas que l’on décide tout à ma place. Ils (Russes - éd.) travaillent comme ça, ils ont tout complètement préparé : on se rencontre et on signe », a déclaré Zelensky.
A propos de la possibilité d'échange de Victor Medvedtchouk
« Écoutez, nous sommes prêts à échanger Victor Medvedtchouk, honnêtement, nous sommes prêts. Bien sûr, la Russie peut proposer de l’échanger contre nos militaires ou contre ce qu’elle peut proposer. Il me semble que nous leur avons signalé cela et s’ils sont intéressés. Alors ils réagiront », a-t-il déclaré.
À propos de la dégradation de l'économie ukrainienne à cause de la guerre
« Il y a deux questions. La première question : nous perdons sept milliards d'euros de notre économie chaque mois. Moins sept milliards, c'est tous les salaires, les paiements, tout ce qui vient du budget. Salaires, pensions, aide sociale. Nous avons maintenant un déficit de sept milliards d'euros. C'est une situation difficile, vous le voyez », a déclaré Volodymyr Zelensky. « Je vous le dis franchement. Nos partenaires sont au courant de ces montants. D'ailleurs, à la fin du mois, nous allons voir comment certains de nos partenaires nous soutiennent. Tout le monde connaît ces montants : l'Union européenne, les États-Unis. Grande-Bretagne, notre peuple et ainsi de suite. Je pense qu'on va sortir de cette situation ».
Selon le président de l'Ukraine, « il faut subvenir aux besoins de nos citoyens. Nous allons aider tout le monde : ceux qui vivent sous occupation russe, ceux qui vivent sur les territoires libres, ceux qui ont déménagé, ceux qui ne bougent pas etc. Nous allons aider tout le monde. Mais toutes nos institutions doivent fonctionner. Je pense que les gens reviendront travailler et que la situation économique s'améliorera. Le premier mois dont je vous ai parlé, moins sept milliards, c'est une histoire compliquée, car il nous fallait des importations complètes, toute l’aide humanitaire. Nous n'avons pas fait attention à la façon dont tout cela était livré, aux files d'attente à la douane… Nous étions intéressés par une arrivée très rapide de nourriture et de médicaments. Approvisionner toutes les villes qui pourraient être occupées le lendemain. C'était notre tâche. Si la ville était occupée, tout devrait déjà être là. Et donc ni douane, ni impôt, personne ne travaillait normalement. Et nous savons bien pourquoi, étant donné que toutes les entreprises ont été fermées.
Le président a noté qu' « il existe des accords avec le FMI, et plusieurs programmes sont en cours d'élaboration pour cette assistance ». « Mais, néanmoins, vous devez comprendre que si cette guerre continue, elle nous épuisera. C'est exact. Par conséquent il y a des subventions, il y a des avantages, il y a plusieurs programmes différents. Maintenant, ils auront une grande réunion financière là-bas… ».
Les Ukrainiens des territoires occupés ne sont pas des collaborateurs
« La question est là : comment travailler et vivre dans les territoires occupés… Ce ne sont pas des collaborateurs, on le comprend. Nous sommes tous des êtres humains et je comprends que ces gens-là peuvent avoir toute sorte de difficultés. Par exemple, ils disent à un professeur de mathématiques: « Nous comprenons que vous avez enseigné aux enfants en ukrainien. Et maintenant, enseignez-les les mathématiques en russe… ». Je pense que l'essentiel pour notre peuple est de survivre là-bas, l'essentiel est qu’ils n’oublient pas qu'ils sont tous citoyens de notre État. Nous allons définitivement libérer toutes nos villes occupées. Je pense que c'est la chose la plus importante ».
À propos du retour des Ukrainiens qui ont quitté le pays
« Personne ne vous dire ce qu’il faut faire. Pourquoi? Les Russes peuvent-ils revenir (sur les endroits désormais libérés des occupants - NDLR) ? Ils peuvent. Mais une ville a-t-elle besoin de fonctionner ? 100 %. Je pense que ça fait sept milliards, désolé, je suis très pragmatique, mais ces sept milliards ne représentent rien pour notre État, vraiment rien. Si les gens vont travailler, nous ne demanderons de l'aide à personne. Nous n'avons besoin de rien, savez-vous. Nous ne voulons pas nous humilier et quémander de l’argent. Mais pour cela, il faut que le pays vive et travaille malgré la guerre. Il faut s’y habituer. Il faut s’y habituer à l'idée de ne pas attendre le moment où il n'y aura plus de tirs. Car tout peut arriver. Nous voulons tous la paix, mais tout peut arriver. Alors, il faut travailler. Et si vous travaillez, vous devez dépenser l'argent comme vous le souhaitez, c'est votre droit. Mais, néanmoins, l'économie doit démarrer. Sans cela, il n'y aura pas d'argent pour notre armée. Et c'est le principal. Nos militaires ont des salaires élevés. Et où trouver cet argent ? L'économie doit fonctionner. Nos partenaires vont nous aider pendant un mois, deux mois, mais ils ne le feront pas toujours. C'est la raison pour laquelle nous devons travailler. Voilà comment je peux répondre à la question faut-il revenir en Ukraine.
Ukrinform
Photo : Office du Président
eh