Économie : La guerre en Ukraine risque de briser l’élan de la reprise mondiale

 La guerre en Ukraine risque de briser l’élan de la reprise mondiale. Elle devrait amputer la croissance mondiale d’environ 1 point de pourcentage, selon les dernières estimations de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), publiées à Genève.

Selon le rapport de la CNUCED, en raison de la guerre en Ukraine et des changements de politiques macroéconomiques opérés par les pays au cours des derniers mois, l’organisation a dû réviser à la baisse ses prévisions de croissance pour l’économie mondiale de 3,6% à 2,6% pour 2022.

Dans ces conditions, les perspectives de l’économie mondiale s’aggravent rapidement, sous l’effet de la hausse des prix des denrées alimentaires, des carburants et des engrais, de la volatilité financière accrue, de la reconfiguration complexe des chaînes d’approvisionnement mondiales et de l’augmentation des coûts commerciaux.

 « Les effets économiques de la guerre en Ukraine vont aggraver le ralentissement économique actuel dans le monde et affaiblir la reprise après la pandémie de la Covid-19 », a déclaré Rebeca Grynspan, Secrétaire générale de la CNUCED.

Le Fonds monétaire international (FMI) avait déjà averti que le conflit ukrainien allait ralentir la croissance de l’activité et provoquerait une hausse de l’inflation. Le Fonds s’apprête à corriger à la baisse sa précédente prévision d’une croissance mondiale de 4,4%, lors de ses assemblées de printemps, à la mi-avril.

Les États-Unis, bien que relativement isolés des chocs actuels, subiront une pression supplémentaire sur les dépenses de consommation en raison de la hausse des prix des carburants et des denrées alimentaires. L’Europe sera plus durement touchée par les prix élevés des matières premières et par le conflit en Ukraine.

Quant à l’économie chinoise, la CNUCED estime que l’objectif de 5,5% de croissance annoncé précédemment constituera un défi. D’autres économies asiatiques seront confrontées à des vents contraires résultant du conflit.

Sur le continent africain, les pays seront touchés de manière inégale, mais les prévisions de croissance pour 2022 de la région dans son ensemble seront inférieures aux estimations faites plus tôt dans l’année. Le poids considérable des exportations de pétrole et de gaz de la région stimulera la croissance.

Si le continent peut compter sur l’exportation de ses matières premières, la plupart, les économies africaines sont également soit dépendantes des denrées alimentaires, soit confrontées à des goulets d’étranglement en matière d’approvisionnement, a détaillé la CNUCED.  Dans l’ensemble, le choc mondial des produits de base impliquera un choc relativement « négatif pour la région dans son ensemble, notamment par le biais des prix alimentaires et de la consommation intérieure ».

Plus globalement, la CNUCED redoute qu’une combinaison d’un affaiblissement de la demande mondiale et de niveaux d’endettement élevés dus à la pandémie ne génère des « ondes de choc financières ». Ceux-ci sont susceptibles de pousser certains pays en développement dans une « spirale infernale d’insolvabilité, de récession et d’arrêt du développement ».

Un scénario préoccupant d’autant que la guerre conduit déjà une hausse des prix de l’énergie et des produits de base. « La pression supplémentaire exercée par les hausses de prix intensifie les appels à une réponse politique dans les économies avancées. Ce qui menace un ralentissement plus marqué que prévu de la croissance », indique le rapport.

Selon la CNUCED, la flambée des prix des denrées alimentaires et des carburants aura un effet immédiat sur les plus vulnérables dans les pays en développement, « entraînant la faim et des difficultés pour les ménages qui consacrent la plus grande part de leurs revenus à l’alimentation ». « La hausse des prix menace les moyens de subsistance, décourage les investissements et fait planer le spectre d’un creusement des déficits commerciaux », indique le rapport.

Les pays en développement devraient avoir besoin de 310 milliards de dollars pour assurer le service de la dette publique extérieure en 2022, soit l’équivalent de 9,2% de l’encours de la dette publique extérieure à la fin de 2020, selon la CNUCED. Parmi ces pays « vulnérables » figurent le Pakistan, la Mongolie, le Sri Lanka, l’Égypte et l’Angola.

Trois d’entre eux, le Pakistan, l’Égypte et l’Angola, ont déjà des programmes à long terme du FMI en place. « De nombreux pays en développement sont maintenant confrontés à de forts vents contraires dus à la guerre. Que cela conduise à des troubles ou non, une profonde anxiété sociale se répand déjà » a mis en garde Mme Grynspan.

Dans ses recommandations, la CNUCED préconise une utilisation accrue des droits de tirage spéciaux pour compléter les réserves officielles et fournir des liquidités en temps opportun afin d’éviter de graves ajustements déflationnistes.

Il s’agit aussi de promouvoir des politiques sectorielles, y compris le contrôle des prix et les subventions, pour s’attaquer aux pressions sur l’inflation du côté de l’offre et des marges.

La CNUCED recommande également soutien financier multilatéral plus important et moins conditionnel, pour les pays en développement afin de leur permettre de résister aux chocs financiers et économiques et d’augmenter les investissements pour soutenir la croissance économique.

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