La guerre en Ukraine met en péril la reprise fragile du commerce mondial, selon l'OMC
Les perspectives de l’économie mondiale se sont assombries depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine le 24 février, amenant les économistes de l’OMC à réévaluer leurs projections sur le commerce mondial pour les deux années à venir.
L’Organisation table même sur une croissance du volume du commerce des marchandises de 3,4% en 2023, mais « ces estimations sont moins certaines que d’habitude en raison de la nature imprévisible du conflit ».
Avec peu de données solides sur l’impact économique du conflit, les économistes de l’OMC ont dû s’appuyer sur des simulations pour formuler des « hypothèses raisonnables » sur la croissance du PIB en 2022 et 2023. Selon ces simulations, le PIB mondial devrait progresser de 2,8% en 2022, après avoir augmenté de 5,7% en 2021.
La croissance de la production devrait atteindre 3,2% en 2023, en tablant sur une incertitude géopolitique et économique persistante. Il s’agit d’un niveau proche du taux moyen de 3,0% entre 2010 et 2019. De plus, la production dans la région de la Communauté des Etats Indépendants (CEI) – qui exclut l’Ukraine – devrait connaître une forte baisse, de 7,9%, ce qui devrait entraîner une contraction des importations de la région de 12%.
Étant donné les hypothèses actuelles concernant le PIB, la croissance du volume du commerce des marchandises en 2022 pourrait se situer entre 0,5% et 5,5%. Le volume du commerce des marchandises mondial devrait croître de 3,0% en 2022 (contre 4,7% auparavant) et de 3,4% en 2023, mais ces chiffres pourraient être revus en raison de l’incertitude concernant l’évolution du conflit en Ukraine.
Le commerce des services sera également affecté par le conflit en Ukraine, y compris dans le secteur des transports, qui comprend le transport de conteneurs et le transport de passagers par voie aérienne.
Dans ce contexte d’incertitude et d’inflation, la cheffe de l’OMC a mis en garde contre une division de l’économie mondiale en blocs rivaux dans le contexte de la guerre en Ukraine.
« La guerre en Ukraine a engendré d’immenses souffrances humaines, mais elle a également endommagé l’économie mondiale à un moment critique. Son impact se fera sentir dans le monde entier, en particulier dans les pays à faible revenu, où les produits alimentaires représentent une large proportion des dépenses des ménages », a dit la Directrice générale Ngozi Okonjo-Iweala, à l’occasion de la présentation annuelle des perspectives du commerce international.
« L’Histoire nous enseigne que le fait de diviser l’économie mondiale en blocs rivaux et de tourner le dos aux pays les plus pauvres ne conduit ni à la prospérité, ni à la paix. L’OMC peut jouer un rôle central en offrant une enceinte où les pays peuvent débattre de leurs divergences sans avoir recours à la force », a-t-elle ajouté.
Si les parts de la Russie et de l’Ukraine dans l’ensemble de la production et du commerce mondial sont relativement faibles, ces deux pays sont d’importants fournisseurs de produits essentiels, notamment de produits alimentaires et d’énergie. L’impact économique le plus immédiat de la crise a été une forte hausse des prix des produits de base.
L’approvisionnement des produits alimentaires, de l’énergie et des engrais est maintenant menacé par la guerre. Et l’impact économique le plus immédiat de la crise a été une forte hausse des prix des produits de base. Selon l’OMC, les expéditions de céréales via les ports de la mer Noire ont déjà été stoppées, ce qui pourrait entraîner des « conséquences désastreuses pour la sécurité alimentaire dans les pays pauvres ».
Par ailleurs, l’OMC estime que la guerre n’est pas le seul facteur qui pèse sur le commerce mondial actuellement. Les confinements en Chine, destinés à empêcher la propagation de la Covid-19, perturbent de nouveau le commerce maritime, à un moment où les pressions dans les chaînes d’approvisionnement semblaient s’atténuer.
« Cela pourrait conduire à de nouvelles pénuries d’intrants manufacturiers et à une inflation plus élevée », a mis en garde l’institution basée à Genève.
Dans ces conditions de fortes pressions inflationnistes, l’OMC note que ce n’est pas le moment de « nous replier sur nous-mêmes ».
« Dans une crise, plus de commerce est nécessaire pour garantir un accès stable et équitable aux produits de première nécessité. Restreindre les échanges mettra en péril le bien-être des familles et rendra plus ardue la tâche d’une reprise économique durable après la Covid 19 », a conclu la cheffe de l’OMC.
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